LA DIGITALISATION DU BTP
Transformation ou transition digitale : des mots qui rassurent certains car ils sont apporteurs de valeurs et qui angoissent d’autres dans le secteur de la construction. Dans tous les cas, le BTP est en retard sur ce sujet.
Les résultats d’une étude conduite par Finalcad en mars 2020 sur le sujet a dévoilé le retard du secteur de la construction dans la transition digitale, que ce soit dans l’investissement dans les technologies ou le recours à la maquette numérique (BIM), comparé à d’autres secteurs qui ont pris le tournant plus rapidement, comme l’industrie, le commerce ou la finance.
Ce retard implique moins de productivité et de rentabilité pour les entreprises, mais sera surtout indispensable à l’avenir, notamment pour répondre aux besoins en constructions, alors que la population mondiale augmente, et que plus de 68 % devrait habiter en ville d’ici 2050, selon une étude de l’ONU réalisée en mai 2018.
Pour répondre à cette demande de logements et d’infrastructures tout en respectant les enjeux écologiques, il va falloir revoir notre façon de travailler. L’amélioration de la productivité du secteur de la construction devra rimer avec transformation digitale.
En faisant face à la crise du Covid-19, les acteurs du BTP ont compris les bénéfices que pourraient apporter le numérique pour le secteur. Fort de cette expérience « forcée », ils vont pouvoir répondre concrètement et rapidement aux enjeux de productivité et de développement durable. Comment être plus efficace ? Cela passe notamment par une meilleure exploitation des données dont ils disposent.
Sans oublier que les informations collectées peuvent également être utilisées à des fins d’audit, en cas de contrôle ou pour un retour d’expérience. Gardées en mémoires, les données relatives à un chantier permettent de standardiser les processus vertueux d’un chantier à l’autre pour viser ainsi des chantiers 100 % conformes à la réglementation.
UNE AMÉLIORATION DES PROJETS AU QUOTIDIEN
Coopération, innovation, anticipation, communication, évaluation… L’intégration du numérique permet de renforcer et mieux structurer les entreprises, pour répondre aux enjeux de productivité et de développement durable.
Contrairement à certains préjugés, le BTP n’a donc pas vocation à se passer du digital, bien au contraire. Dans cette perspective, trois recommandations de solutions permettent d’ores et déjà des avancées concrètes et rapides : la gestion d’affaires, la gestion d’actifs et le Building Information Modeling (BIM).
Pour le secteur de la construction, la productivité est une question vitale, que la crise a (et certainement va) encore accentuer. En dépit de progrès importants au niveau des machines et des matériaux, la productivité du BTP a eu tendance à reculer si on se compare à d’autres industries. De nouvelles façons de produire, comme la construction hors site ou l’impression 3D, offrent des perspectives prometteuses, mais elles ne peuvent constituer des réponses à grande échelle que dans le cadre de processus plus industrialisés.
« La transformation digitale supprime les silos existants et simplifie la difficulté que les entreprises rencontrent, à savoir jongler avec le personnel, les plans, les compétences et les matériaux pour répondre à un calendrier changeant, tout en améliorant leur rentabilité et la satisfaction des clients finaux », Franck Le Tendre de Finalcad.
Le numérique aide les acteurs à anticiper davantage, mieux se coordonner, évaluer les pratiques pour s’améliorer ou encore répliquer ce qui peut l’être. C’est principalement la difficulté à formaliser et transmettre l’information au sein de l’organisation et entre les différentes parties concernées que la productivité ralentit. C’est aussi ce qui peut expliquer la diminution de ses marges et l’accumulation de risques non calculés.
Attention cependant à la gestion du changement, à laquelle il faut apporter une grande attention. Dans un secteur de traditions, le digital constitue une vraie rupture culturelle et il importe de réaliser que la digitalisation ne prive pas les acteurs du secteur de leur autonomie et de leur savoir-faire. Au contraire, elle est là pour les aider et valoriser leurs compétences.
DIGITAL ET BTP, LES PREMIÈRES BRIQUES
Si les architectes et les cabinets d’études ont rapidement troqué le papier contre des outils et logiciels automatisés, les chantiers eux, ont plus de mal à effectuer la transition digitale. C’est notamment ce qui a conduit le ministère du Logement à lancer le « Plan Transition Numérique dans le Bâtiment » en 2014, qui avait pour but de multiplier le nombre de constructions neuves grâce aux nouvelles technologies.
Beaucoup d’entreprises, en partie poussées par la législation et en partie parce qu’elles y voient des gains de productivité ont décidé de maîtriser leur transformation numérique au lieu de se la faire imposer.
Plusieurs start-ups se sont intéressées à l’association du digital et du BTP. Elles proposent leurs services autour de deux principaux axes : le BIM et le suivi de chantier.
On l’explique dans un autre article dédié, mais le concept du BIM repose sur la conception d’une maquette numérique 3D d’un ouvrage. Ainsi, la centralisation et le partage des données est au cœur du processus pour que tous les acteurs (architectes, ingénieurs, maître d’œuvre, etc.) puissent compléter, modifier et apporter leur contribution tout au long de l’avancement de l’ouvrage.
Les plateformes de suivi de chantier comme BulldozAir ou FinalCad facilitent le pilotage et le suivi des travaux. Tous ces outils en ligne permettent une bonne coordination et communication entre les collaborateurs. Ils assurent par exemple le partage de données, de rapports d’expertise et de photos d’avancées de chantier.
D’autres applications du digital en cours de développement concernent la construction de modules en usine grâce à des robots connectés. Une solution qui a l’avantage de réduire les nuisances liées aux chantiers, d’éviter les erreurs et les malfaçons. Par voie de conséquence, les retards et le gaspillage de matières premières deviendraient exceptionnels (?).
LE DIGITAL, LA RÉPONSE AUX ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX DE LA CONSTRUCTION
Entre le Plan Climat ou la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, les textes réglementaires pour accélérer la transition écologique sont nombreux. La gestion des déchets de chantier est souvent au cœur des discussions. Et pour cause, le BTP génère près de 230 millions de tonnes de déchets chaque année en France, auxquels il faut ajouter les coûts d’élimination de ceux-ci.
L’objectif avec la transition numérique est de réduire les coûts d’élimination, en même temps que valoriser le projet auprès de la maîtrise d’ouvrage et d’assurer la traçabilité afin de répondre aux aspects réglementaires, mais aussi aux exigences clients.
En effet, dans les marchés publics, de plus en plus de clauses environnementales sont incluses dès les appels d’offres et ont un impact direct sur l’exécution des travaux. Plusieurs critères devront donc être pris en compte : la gestion des ressources en eau, la protection des milieux naturels, la réduction des émissions de gaz à effet de serre ou encore la consommation énergétique. La réglementation impose, en outre, un suivi précis des travaux pour assurer leur traçabilité. Et pour ça, la digitalisation des processus sera un atout précieux.